31.03.2025
Viktoria Kirchhoff

Le massacre des brumbies: les chevaux sauvages servent de boucs-émissaires

Depuis que « l’homme blanc » a foulé le sol australien, les brumbies parcourent les paysages de l’Australie, symbole de résilience et d’héritage culturel. Malgré cette longue histoire commune, ils sont présentés par les autorités australiennes comme des « nuisibles sauvages envahissants ». Depuis novembre 2023, ces chevaux sauvages emblématiques ont fait l’objet de tirs systématiques. Nous demandons la fin de cette cruauté !

L’origine des brumbies

Les Brumbies, initialement amenés d’Angleterre en Australie en 1788 avec la « First Fleet » (premiers navires britanniques qui ont accosté sur l’île pour s’y installer), constituaient l’épine dorsale de l’exploration du pays, de l’agriculture et même de l’effort de guerre. Lorsque leur utilité a été dépassée, ils ont été relâchés dans la nature. Les chevaux se sont adaptés aux paysages accidentés de l’Australie et ont formé des troupeaux sauvages dans tout le pays – des Alpes australiennes en Nouvelle-Galles du Sud (NSW) et dans l’Etat de Victoria, notamment dans le parc national de Kosciuszko (KNP), également appelé « Snowy Mountains », jusqu’au vaste outback du Territoire du Nord et de l’Australie occidentale. Ils font aujourd’hui partie du pays au même titre que les hommes qui l’ont colonisé. Les Brumbies sont donc aussi indigènes à l’Australie que «l’homme blanc» ! Malgré cette longue histoire et leur importance culturelle, ils sont présentés par les autorités australiennes comme des «parasites sauvages envahissants».

Le massacre actuel dans le Parc national de Kosciuszko, NSW  

Depuis novembre 2023, après une interdiction d’abattage de 20 ans en Nouvelle-Galles du Sud, les chevaux emblématiques du parc national de Kosciuszko sont régulièrement soumis à des tirs aériens d’une grande brutalité. Ils sont abattus par hélicoptère, dans un bain de sang qui empoisonne la terre et les eaux. D’octobre 2023 à octobre 2024, 8,2 millions de dollars australiens de fonds publics ont été dépensés pour abattre et enlever 8 000 brumbies.

Les procédures opérationnelles standard (SOP de l’anglais Standard Operating Procedure) du parc national de Kosciuszko stipulent que la mise à mort des brumbies ne peut se faire que dans des conditions « humaines » : les animaux doivent être tués rapidement et sans douleur par un tir ciblé sur la tête ou le cœur afin d’éviter toute souffrance inutile. Si le premier tir ne suffit pas, un deuxième est effectué pour euthanasier rapidement l’animal.

Comment est-il possible, depuis des hélicoptères en vol, de viser avec précision un animal qui s’enfuit en panique ? Des études menées après les abattages ont montré que de nombreux brumbies avaient reçu des balles dans le ventre, la nuque et le dos, ce qui leur a valu une mort longue et douloureuse. Les juments portantes qui ont été atteintes au ventre ont spontanément avorté. Des poulains non encore sevrés erraient désespérément autour des cadavres de leurs mères et ont fini par mourir de faim. Les SOP du parc national ne sont donc pas respectées. Il est également faux d’affirmer, comme le font les autorités, que la mise à mort est humaine et évite des souffrances inutiles parce que « des familles entières de chevaux sont abattues en une seule fois ». Ce n’est pas parce que tout le groupe familial est tué – si tant est que cela soit possible ! – que les animaux sont abattus de manière humaine. 

Des arguments peu crédibles

Les autorités australiennes, dont la Ministre du Changement climatique, de l’Énergie, du Patrimoine et de l’Environnement, Penny Sharpe, ainsi que des groupes tels que l’Invasive Species Council (Conseil des espèces invasives), s’efforcent depuis des années de propager l’idée que les brumbies constituent une menace écologique. Ils affirment que les chevaux endommageraient des écosystèmes fragiles, remplaceraient les espèces indigènes et menaceraient la biodiversité en provoquant la contamination et l’érosion des sols, ainsi que la destruction des habitats. 

Cependant, aucune étude d’impact du brumby n’a jamais été réalisée pour étayer ces allégations ! Aucune analyse scientifique n’a été menée pour démontrer que les brumbies endommageraient effectivement la végétation, ou affecteraient des écosystèmes fragiles, des espèces indigènes ou menacées. Au lieu de cela, le gouvernement s’appuie sur des recherches portant sur d’autres espèces, dans lesquelles les brumbies sont identifiés comme une source potentielle de dommages. Les protecteurs des chevaux ont pourtant demandé, à plusieurs reprises, la réalisation d’une étude concernant directement les brumbies, en vain.

En 2023, Penny Sharpe a estimé la population de brumby dans le parc national de Kosciuszko à environ 12000 à 22000 individus. Cette estimation a été démentie, la même année, par Claire Galea, une biostatisticienne indépendante expérimentée, qui l’a qualifiée d’« erronée » et de «surestimée».

Le 3 mars 2025, la Ministre Sharpe a indiqué que « puisque plus de 8 000 Brumbies ont été retirés du parc depuis novembre 2023, les tirs par hélicoptère sont actuellement suspendus, mais pourraient reprendre. Les tirs au sol dans le KNP se poursuivront, de même que les transports des Brumbies vers les abattoirs ».

Les brumbies sont aussi « indigènes » à l’Australie que les hommes blancs!

Censure médiatique et manque de transparence

Un autre aspect inquiétant de cette situation est le fait que la couverture médiatique des Brumbies en Australie semble limitée et partiale. Les photos de Brumbies souffrants ou morts, dont les corps se décomposent lentement et contaminent les sources d’eau, ont été supprimées, de sorte que l’indignation du public reste minime. Ce manque de transparence soulève de sérieuses questions éthiques concernant la démocratie, la politique de conservation et le droit des citoyens australiens à savoir comment leurs parcs nationaux sont gérés – ou justement mal gérés.

La vérité : les brumbies aident la biodiversité

Les brumbies sont devenus une partie intégrante de la nature australienne et de sa biodiversité. Ils jouent un rôle important dans l’écosystème en régulant la croissance des plantes par leurs activités de pâturage, ce qui réduit le risque de feux de brousse en évitant l’accumulation d’une végétation dense et sèche. Les chevaux se nourrissent de la végétation grossière, recyclent la matière végétale et aident à la dissémination de plantes nutritives pour les autres herbivores.

Leur fumier est un humus riche en nutriments qui améliore la qualité du sol, favorise la croissance des plantes indigènes, renforce la vie microbienne et augmente la capacité de rétention d’eau, en particulier dans les régions sèches. Grâce à leur comportement semi-nomade, les brumbies disséminent des graines et favorisent le renouvellement végétatif, ce qui contribue à la biodiversité.

La preuve du contraire : Bonrook, la réserve de chevaux sauvages de la FFW

Avec plus de 35 ans d’expérience, la Fondation Franz Weber (qui œuvre en Australie depuis 1989) peut confirmer que les brumbies ne représentent aucun danger pour la faune et la flore australiennes et qu’il n’y a donc aucune justification à leur abattage. Sur la réserve de chevaux sauvages de Bonrook dans le Territoire du Nord – la seule zone protégée d’Australie abritant une importante population de brumbies – environ 800 brumbies, 120 bovins sauvages, 100 buffles d’eau ainsi que de nombreuses espèces animales et aviaires indigènes vivent en équilibre harmonieux sur près de 500 km2. 

Il n’est pas possible de déplacer les chevaux sauvages du parc national de Kosciuszko, qui se trouve au sud de l’Etat de Nouvelle-Galles du Sud, vers la réserve de chevaux sauvages de Bonrook, dans le Territoire du Nord, au nord du pays. 3’730 km séparent ce parc national du Franz Weber Territory, ce qui impliquerait un transport de plus de 50 heures – comparable à la distance entre Lisbonne et Moscou.

Le chargement de chevaux domestiqués est déjà un défi en soi – et ça l’est d’autant plus pour les chevaux sauvages. Le transport de ces derniers est une entreprise dangereuse et coûteuse. De plus, la condition physique des chevaux brumbies de la Nouvelle-Galles du Sud n’est pas adaptée au climat chaud et subtropical du Territoire du Nord.

Exigez la fin des mises à mort cruelles !

Les tirs dans le parc national de Kosciuszko ne servent pas la protection de la nature – c’est une question de commodité politique, de recherche de boucs émissaires et de tentative de dissimuler des décennies d’échec dans la gestion de l’environnement. Si la protection de l’environnement était réellement la priorité, les autorités investiraient dans des mesures humaines de contrôle des populations, réintroduiraient des prédateurs naturels et adopteraient des stratégies conformes à une gestion éthique de la faune.

Les brumbies australiens sont plus que des chevaux sauvages – ce sont des symboles vivants d’endurance, d’histoire et du fragile équilibre de la nature. Leur abattage n’est pas seulement inutile, il entache l’engagement du pays en faveur de la protection des animaux. Tant que le silence ne sera pas brisé et que l’attention du public ne sera pas éveillée, les mises à mort se poursuivront – de manière incontrôlée, non contestée et totalement infondée. Le temps est venu d’une véritable protection de la nature – pas d’un bain de sang sanctionné par l’État !

 

STOP AU TIR DE BRUMBIES ! Nous avons besoin de votre voix pour exiger la fin de ces abattages !


Franz Weber Territory – Bonrook Station

En 1987 et 1988, la Fondation Franz Weber (FFW) a rendu public le massacre des Brumbies auprès de la population européenne, a lancé une campagne de sensibilisation, pour combattre les abattages systématiques de ces chevaux sauvages.

En novembre 1989, suite au tollé international qu’ont suscité les tirs de brumbies, la FFW a acquis la Bonrook Station, un ancien élevage de bovins dans le Northern Territory (NT) australien. La réserve de chevaux sauvages « Franz Weber Territory » est située à 2,5 heures de route au sud de Darwin: un pâturage clôturé de 495 km² (18 x 28 km, presque aussi grand que l’île d’Ibiza aux Baléares), protégé et proche de la nature, abritant une brousse subtropicale et offrant un refuge sûr aux brumbies et aux animaux indigènes.

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