Dans l’édition du 16 février 2025 de la NZZ, le vétérinaire Marcus Clauss affirme que nous sommes une planète d’humains et que nous avons donc la responsabilité de tout contrôler, y compris la survie des espèces animales. Selon lui, l’élevage et la mise à mort d’animaux dans les zoos servent à protéger les espèces. Son argumentation suit une vision du monde fortement anthropocentrique, qui considère l’homme comme l’être vivant le plus important et lui donne un statut supérieur à tous les autres. Cette vision est tellement polarisée que nous devons prendre position à ce sujet.
Depuis quelque temps, les zoos se présentent comme des lieux d’éducation, de recherche, de protection de la nature et des espèces. Ils affirment qu’ils servent en quelque sorte de « banque » pour les animaux. Ils argumentent qu’ils sont le meilleur endroit pour assurer la survie des animaux – qui se retrouvent enfermés hors de leur habitat et de leurs modes de vie naturels.
Les zoos se concentrent avant tout sur le maintien en vie des animaux enfermés, ainsi que sur les programmes de reproduction au sein de leurs institutions. Ils s’efforcent de donner au public l’impression que les espèces menacées y sont protégées de l’extinction. Or, très peu d’espèces animales peuvent effectivement être réintroduites dans la nature avec succès – et même celles qui le peuvent n’ont aucune chance de survie si leur habitat n’est pas conservé intact.
La destruction et la réduction progressives des habitats naturels constituent la plus grande menace pour les espèces animales et végétales. Pourtant, seule une part minime des recettes des zoos est consacrée à la protection ou à la restauration des écosystèmes. Au lieu de cela, des dizaines de millions sont investis dans l’extension de zoos, le transports d’animaux pour échanges entre zoo et des programmes d’élevage – des mesures qui ne servent qu’à perpétuer l’activité du zoo au lieu de s’attaquer aux véritables causes de la disparition des espèces.
Sans habitats intacts, l’existence d’animaux dans un zoo perd finalement tout son sens, et n’assouvit que notre besoin de contempler des animaux exotiques. Pour les animaux eux-mêmes – selon l’espèce – leur enfermement à vie n’a aucun avantage, mais est plutôt synonyme de souffrances permanentes.
Il est particulièrement inquiétant de constater que les zoos n’ont pas de solution durable pour le nombre inévitablement croissant des animaux qu’ils détiennent. Au lieu d’abattre les animaux « en trop » et s’ils étaient vraiment intéressés à favoriser la prospérité d’une espèce, ils développeraient des stratégies à long terme – par exemple en mettant en place des programmes de réintroduction ciblés, en créant et en préservant de grandes zones protégées ou en créant des réserves dans les habitats naturels des animaux.
Selon le Dr Keith Lindsay, un éminent expert en biologie des éléphants, «les zoos prennent souvent des mesures délibérées, ou alors par négligence, dans le seul but d’obtenir de nouvelles naissances. Ces tentatives peuvent être dangereuses et même particulièrement cruelles». Un exemple alarmant est celui de l’éléphante d’Afrique Heri, détenue au zoo de Bâle. Elle a été délibérément abandonnée au mâle Tusker dans l’espoir qu’elle ou une autre éléphante du zoo devienne portante.
« Malgré son âge avancé, son manque d’expérience en tant que mère et le fait que le seul bébé auquel elle a donné naissance, il y a environ dix ans, était mort-né, l’accouplement a été autorisé», explique le Dr Lindsay. Cette fois, cependant, le bébé est mort dans le ventre de sa mère. Le cadavre se trouve toujours en elle – mettant initialement sa vie en danger imminent, et présentant aujourd’hui un risque à long terme, d’un point de vue physique et psychologique.
Dans son article, Marcus Clauss argumente que les zoos priveraient les animaux d’un « besoin essentiel » s’ils empêchaient la reproduction, notamment par la contraception. Cet argument ignore totalement le fait qu’un zoo ne pourra jamais répondre aux besoins des animaux qu’il détient, à tout le moins concernant les grandes espèces exotiques – comme par exemple, les éléphants, les félins, les grands singes ou les girafes.
« Les zoos n’offrent même pas les conditions de base pour répondre aux besoins physiques, sociaux et psychologiques des animaux », explique Tom Sciolla, expert de la FFW en matière de protection de la biodiversité et de transformation des zoos. L’exemple le plus frappant est peut-être celui de l’éléphant. Dans la nature, il parcourt environ 10 kilomètres par jour, passe le plus clair de son temps à chercher de la nourriture, entretient des liens sociaux étroits avec sa famille et bénéficie de l’expérience de ses aînés – notamment pour la reproduction.
Dans les zoos, en revanche, les éléphants sont confinés dans des espaces minuscules. Ils vivent dans des groupes artificiels où les conflits sont fréquents et ne peuvent être évités. Le manque d’exercice, d’occupation et le stress psychologique entraînent souvent des stéréotypies – des comportements compulsifs et répétitifs. Avant de garantir un «droit à la reproduction», les zoos devraient se demander s’ils satisfont – ou peuvent satisfaire – les autres besoins fondamentaux de leurs animaux.
L’article de la NZZ est simpliste, réductionniste et trompeur. Il ne fait que justifier les pratiques obsolètes des zoos et leur anthropocentrisme. Le véritable objectif des zoos n’est pas la conservation d’espèces menacées dans leur habitat naturel, mais l’exhibition commerciale d’animaux à des fins de divertissement.
Les prétendues «vérités qui dérangent» présentées par l’auteur s’effondrent face au véritable malaise : ce qui dérange, c’est sa description de notre planète comme « la planète des humains » – un endroit où il n’y a plus de place pour les animaux sauvages dans la nature et où ils ne peuvent exister que dans des zoos, sans aucune chance de vivre un jour dans leur habitat naturel et en liberté.
Peut-être que la vérité la plus dérangeante de toutes est la suivante : les zoos tuent les animaux en voie d’extinction parce qu’ils sont « trop nombreux » en captivité.
C’est de cela que nous devrons véritablement assumer la responsabilité un jour.